Accord National sur l’emploi du 11 janvier 2013: La grande braderie des droits des salariés

Le 11 janvier, les négociations nationales dites de « sécurisation de l’emploi » se sont terminées par un projet d’accord d’une extrême gravité pour les droits des salariés. La CGT et FO ont annoncé qu’elles ne le signeront pas. Par contre, la CFDT, la CGC et la CFTC ont décidé de le parapher.  Un projet de loi début mars doit être présenté au Conseil des ministres pour ensuite être soumis au Parlement.

La CGT s’adresse avec solennité à l’ensemble des salariés : cet accord concerne tous les salariés et prétend mettre en place ce dont le MEDEF a toujours rêvé et qu’il n’avait jamais réussi à imposer.

Un accord de flexibilisation forcée :

Alors qu’il y a chaque jour plus de 1500 nouveaux chômeurs, que les ruptures conventionnelles (dont 80% sont imposées aux salariés) et les plans de départs volontaires » explosent, le patronat prétend qu’il serait difficile de licencier ? Que le droit du travail serait trop rigide ? Faudrait-il pour travailler accepter de perdre tous ses droits, que le travail non ou mal déclaré devienne la norme, que les « mini jobs » à l’allemande ou le travail « indépendant» à la roumaine ou à la polonaise fleurissent ?

L’accord organise, la mobilité interne forcée, d’un site à l’autre, sans aucune limite garantie nationalement, pour le temps et la distance supplémentaire de trajet. Et celui qui refusera sera licencié pour « motif personnel » !

Un accord de sécurisation de la délinquance patronale :

Les salariés, quelle que soit la taille de leur entreprise, quel que soit leur type de contrat et même s’ils sont mal déclarés, ont aujourd’hui un  droit commun : pouvoir aller aux prud’hommes et espérer récupérer les sommes qui leur sont dues.

L’accord met en place un maximum récupérable selon l’ancienneté et empêche de remonter au début du préjudice. La réparation pour des faits remontant à plus de 3 ans ne sera plus possible!

Au delà des heures ou des salaires non payés, les victimes de harcèlement, de discriminations et celles de l’amiante apprécieront !

En instaurant des peines « plafond », l’accord fait des employeurs la seule catégorie qui échappe en France à la sanction proportionnelle au délit.

Un accord de chantage à l’emploi :

N. Sarkozy en avait fait son cheval de bataille. Mais ça avait raté. Les salariés savent par expérience que quand ils acceptent « pendant une période difficile » de réduire leur salaire et leur temps de travail, dès que l’accord est terminé, le patron invente autre chose avec des plans de licenciements à la clé.

L’accord prévoit que les salariés qui touchent en net à partir de 1300 euros par mois pourront voir leur salaire baissé ou leurs horaires modifiées pendant 2 ans ! C’est toujours le même discours : si ça va mal, c’est de la faute des salariés, qui seraient « trop payés ». Par contre, rien sur une baisse « temporaire » des éventuels dividendes versés aux actionnaires !

Une attaque en règle contre le CDI :

Le MEDEF n’a pas réussi à imposer son « CDI de projet », mais veut expérimenter pour des salariés des petites entreprises le contrat « intermittent », c’est à dire un contrat totalement flexibilisé, qui empêche toute vie régulière et toute construction d’avenir.

Le patronat veut faire avaliser l’instauration d’un pseudo CDI dit CDI intérim sur lequel les négociations  de branche butent depuis des mois.

Un accord pour faciliter les licenciements :

Aujourd’hui 3% des nouveaux chômeurs ont pu « bénéficier » d’un plan social, c’est encore trop pour le MEDEF.

Sa solution est radicale : décider de la procédure de licenciement et du contenu du plan social par simple accord d’entreprise, voire, si les délégués sont récalcitrants, par un simple document de l’employeur homologué par la direction du travail. Il suffira à l’employeur de consulter la CE, (un avis négatif suffit)  et d’attendre 3 semaines la réponse de l’administration. Sans réponse, le texte est homologué et le patron peut licencier.

Où sont les mesures contre les licenciements boursiers, les possibilités données aux salariés pour construire des propositions alternatives aux projets patronaux ? Le recours à l’expert est limité comme jamais, le juge est mis « hors sujet », et tous les délais sont fixés à l’avance.

Rien n’est prévu pour accompagner les salariés licenciés : aucun moyen nouveau pour Pôle emploi, rien de neuf au niveau du bassin d’emploi. Les droits individuels à la formation restent à 120 h maximum….

En « contrepartie » de ces reculs, des avancées pour plus tard, peut-être, et pas pour tous :

  • Une complémentaire santé pour tous ? Les salariés des entreprises de moins de 50 salariés ne sont, pour la plupart, pas concernés ! Par contre les assurances se frottent les mains à l’avance du pactole qui va leur être offert. Tant pis pour la Sécu !
  • Des « droits rechargeables » à l’indemnisation pour les demandeurs d’emploi ? Ce sont les chômeurs eux-mêmes qui vont devoir se les payer entre eux, le Medef ne prévoyant pas de recettes supplémentaires. Ceci alors que plus de 50% des chômeurs ne sont pas indemnisés aujourd’hui!
  • Des « contrats courts » enfin taxés ? Tant mieux, mais le Medef a réussi à ce que cette mesure ne rapporte rien à l’UNEDIC, mais rapporte plus de 40 millions d’euros aux employeurs, puisqu’ils ont décidé d’exonérer de cotisations patronales l’embauche de jeunes de moins de 26 ans. C’est un nouveau jackpot pour le patronat!
  • Un encadrement du travail à temps partiel ? Les 24h hebdomadaires mini prévues pour tout contrat à temps sont en réalité un chiffre « lissé » sur l’année pour ceux et celles qui sont déjà à temps partiel. Ce qui autorise tous les abus. Pour les autres, si le salarié le demande (surtout si l’employeur lui conseille de demander), ce minimum peut être diminué. Et l’employeur pourra imposer de modifier 8 fois par an le volume d’heures hebdomadaire. S’il y a plus d’heures que prévu, elles ne  seront pas forcément considérées comme des heures complémentaires et donc ne seront pas payées plus !

Le pompon de ces « avancées », c’est qu’aucune ne s’applique tout de suite. Il va falloir que de nouvelles négociations s’ouvrent, en particulier dans les branches professionnelles.

Le « nouveau modèle économique et social » que cet accord veut imposer, n’a rien de neuf : c’est le règne du « gré à gré », la destruction des socles de garanties collectives, comme si le salarié était à égalité face à son patron. C’est le libéralisme et sa loi de la jungle ! Les Français l’ont rejeté en mai dernier.

Le MEDEF, qui tient là sa revanche, appelle à transposer l’accord « tel quel » dans la loi. Il n’y a aucune raison pour lui faire ce cadeau : Mobilisons-nous partout pour que la loi à venir rompe avec la politique précédente et construise réellement de la sécurité pour l’emploi des salariés.

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